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Photo : © P.Brocard / Républicain Lorrain

Gervaise PIERSON, ex-handballeuse de haut niveau gardienne internationale
désormais kinésithérapeute témoigne sur son parcours.

 

Ta carrière est terminée depuis quelques années, quels sont tes meilleurs souvenirs ?

Les rencontres humaines ont été très riches. Côtoyer d’autres joueuses étrangères et découvrir une culture différente, ça n’a pas de prix. Au final, c’est vraiment cela que je retiens bien avant les médailles et trophées remportés. Ces rencontres m’ont permis de prendre conscience de la réalité quotidienne d’autres sportives, comme par exemple des filles de l’ex-Yougoslavie qui avaient connu la guerre dans leur jeunesse alors que j’ai passé la mienne tranquillement dans les montagnes vosgiennes, à finalement à peine 1000km… Ca fait réfléchir ! Je suis encore en contact avec certaines joueuses aujourd’hui via les réseaux sociaux, c’est toujours sympa d’échanger et de garder le lien.

Et du coup, as-tu également des regrets ?

Je n’ai joué qu’en France car je voulais continuer mes études, donc évidemment une expérience dans un club étranger plus particulièrement en Norvège. Cela aurait pu être très sympa et enrichissant.

En dehors du sport, au niveau de mes études et avec un peu plus de recul, je pense que mes choix et mon orientation auraient pu être différent, notamment vers les sciences de la vie ou l’écologie. Au-delà de ça, je suis très contente de mon parcours et de pouvoir exercer une profession que j’apprécie (kinésithérapeute). Ça permet d’aborder l’après carrière sereinement ce qui n’est pas évident car il y a toujours un petit manque (la vie de groupe, la compétition, les émotions…).

Quelles sont les limites que tu as pu entreprendre dans ta carrière en tant que sportive de haut niveau ?

A un moment de ma carrière, j’étais performante sur tous les fronts (en club, école de kiné, équipe de France) et j’ai tiré sur la corde. Je suis arrivé à un stade où je ne pouvais plus continuer sur ce rythme, il fallait que cela s’arrête. Je pensais que mon corps finirait par lâcher tellement c’était dur à vivre. Psychologiquement j’étais cuite, j’ai fait un burn-out. J’ai été au fond du trou 2/3 mois, mais dans les faits, il faut beaucoup plus de temps pour s’en remettre.

Je n’en veux à personne, je suis la seule responsable, même si mon entourage professionnel n’a alors pas été très réactif. Je n’avais pas mesuré l’ampleur du travail qui m’attendait et personne ne m’a vraiment simplifié les choses au préalable. Cependant une fois dans le trou, les gens ont été compréhensifs et m’ont beaucoup aidée.

Concilier études et sport de haut niveau, c’est compliqué. Ou alors tu fais des études par défaut, qui ne t’ouvriront pas forcément de portes après ta carrière. Les deux s’opposent car les rythmes des cours, des matches, des entraînements s’entrecroisent en permanence. Dans les pays nordiques, les cours à distance sont par exemple mis en place et vraiment adaptés à la pratique du sport de haut niveau. Dans mon cas, j’ai manqué une sélection en équipe de France à cause d’un examen universitaire… difficile de trouver cela normal !

Les relations avec les clubs sont aussi parfois délicates. On t’apprend à ne pas mordre la main qui te nourrit même si la viande peut être avariée. Heureusement que le syndicat des joueur(se)s de handball nous soutient et peut intervenir, par exemple lors de contentieux financiers. C’est un vrai plus et un service non négligeable car dans certains cas, on n’est pas loin de l’exploitation (non-respect des temps de guérison par exemple). Dans tous les sports, il suffit de penser à l’enchaînement des matches dans le calendrier et des dégâts physiques qui en découlent ; car, dans les grands clubs, la pression est sur toutes les compétitions.